Nous sommes un groupe d’amis en quête de nature qui aime se retrouver régulièrement pour 2 raisons principales: partager un moment ensemble et sortir de notre zone de confort afin de ressentir cette fierté dans l’accomplissement d’une aventure, puis retourner à nos vies de citadins régénérés, mais surtout avec les yeux rivés sur la prochaine “expédition”.
Nous nous retrouvons 4 à 5 fois par an pour des micro-aventures de 2 à 4 jours, dans lesquelles nous pratiquons 2 activités principales : le bikepacking et la randonnée. Le point commun est l’autonomie et le dépassement de soi, donc nous partons avec le nécessaire de bivouac, de pluie et de quoi manger chaud. Cela requiert un peu de préparation et de matériel que nous complétons et améliorons au fur et à mesure de nos expériences.
Nous sommes adeptes de l’ultra léger afin de profiter au maximum sans souffrir du poids des sacs et sacoches.
Nous retrouver pour 2 jours autour du Hohneck, dans Les Vosges, en espérant que la neige soit de la partie pour une randonnée en raquettes. Et pour Hugues et moi, c’est aussi le prétexte à un premier bivouac hivernal dans la neige en montagne.
Le massif montagneux des Vosges et la neige, c’est un peu la roulette russe même si autour du Hohneck et de la route des Crêtes le climat continental apporte des hivers rigoureux et très longs avec de fortes chutes de neige.
Le Hohneck est le troisième sommet des Vosges avec 1363 mètres d’altitude. Le massif des Vosges, dû à sa latitude élevée, est un des plus froids à altitude similaire avec une limite pluie neige très basse. Le climat du Hohneck est qualifié d’islandais ou d’écossais, c’est dire!
Avec son climat montagnard, les étés sont courts, frais et orageux et les hivers longs et rigoureux avec des vents qui peuvent y être très violents passant régulièrement la barre des 150 km/h.
Il est tout à fait possible de pratiquer l’alpinisme en hiver sur le versant Est (Alsacien), très abrupt au caractère subalpin, il faut d’ailleurs faire attention aux avalanches dans certains couloirs. Le ton est donné.
Les jours précédents notre arrivée au refuge du Sotré, la météo annonçait des précipitations et des vents “violents” mais pas très froid. Le moral était bas car nous envisagions la pluie, ce qui était le pire scénario, mais ce ne fût pas le cas.
Arrivés de Paris à Nancy par le TGV, nous retrouvons nos trois acolytes (Joao, Ludovic et Sébastien) dans la voiture qui nous conduit sous la pluie jusqu’à Xonrupt-Longemer. Mais dans l’ascension du Col de la Schlucht, les sourires se dessinent sur nos visages lorsque la neige se transforme et nous déroule un joli tapis blanc jusqu’au parking du refuge du Sotré au pied du Hohneck.
Il est environ 9h lorsque nous atteignons le point de départ de notre aventure: Les 3 Fours et la promesse d’une vue spectaculaire sur la Combe du Wormspel et le sommet du Hohneck. Ludovic, notre guide sur ce tour, nous indique également que quelques troupeaux de chamois ont pris possession des pentes abruptes sur le versant Est.
Nous voila partis depuis 10 minutes que le vent souffle et les nuages évoluent très vite pour voiler et dévoiler le paysage à chaque clignement de cils. Nous prenons le temps de nous approcher de la falaise et apercevons les chamois très à l’aise dans cet environnement.
Il est temps de filer vers le sommet du Hohneck. La montée est simple mais déjà très fraîche et venteuse.
Le refuge du Hohneck est fermé, nous sommes seuls au monde. Une percée dans le ciel nous laisse apercevoir le Lac de Schiessrothried vers lequel nous mettons le cap. En passant par Aussicht, nous profitons de la vue et du balais des chamois qui passent au loin.
Notre plan est de rallier le refuge du Rainkopf pour 15h, puis de redescendre vers le lac de Blanchemer et de nous installer autour du refuge avant la nuit. Initialement nous voulions prolonger jusqu’au refuge du Machais, mais il est trop tard.
Arrivé en bas, nous serpentons entre les lacs de Schiessrothried et de Fischboedle où il est l’heure de déjeuner. Ce lac encaissé ne nous laisse pas beaucoup de temps au soleil pour profiter de notre pause. Le froid s’insinue de partout et l’humidité du lac se fait très vite sentir. Il n’est pas l’heure de trainer. Retrouvons au plus vite le versant sud et la chaleur des derniers rayons du soleil.
Nous filons à travers la magnifique forêt et ses cours d’eau qui offrent un spectacle magnifique de vert et blanc. Le tout a des airs de Norvège ou de Canada, ou simplement de Vosges. Il suffisait de l’imprimer dans la rétine pour que ce paysage devienne une référence vosgienne.
Le versant sud est en effet réconfortant mais la trace, avec toute cette neige, est difficile à suivre et un mur de neige se présente, pas certain que ce soit le chemin à suivre. Cependant c’est le plus “facile” à emprunter car marcher de travers en raquettes s’avère très difficile et douloureux pour les pieds et les chevilles. La pente est vraiment abrupte et il faut faire très attention. Ludovic l’a appris à ses dépends, il a manqué un pas et s’est vu glisser de côté sur 10 mètres sans pouvoir faire quoi que ce soit. Une branche d’arbre salvatrice lui a évité de glisser plus longtemps.
Il est 16h50 et le jour décline. Certes le spectacle est magnifique avec ce coucher de soleil sur la montagne et les forêts mais nous ne sommes pas arrivés et le froid s’intensifie.
Nous descendons rapidement dans la forêt abrupte vers le lac de Blanchemer. 45 minutes plus tard nous y sommes. Le refuge est occupé par 7 randonneurs et nous apercevons un certain nombre de tentes dans les alentours. Par chance la seconde pièce est ouverte alors qu’elle est réservée aux chasseurs habituellement. Ce refuge n’est pas adapté pour y dormir mais Joao, Sébastien et Ludovic n’ont pas le choix; c’était leur plan et ils n’ont pas de tente. Il va leur falloir être patient et attendre que tous les occupants aillent se coucher et qu’ils puissent y faire place nette. Quant à Hugues et moi, nous installons notre bivouac à l’aide du tarp que j’ai dans mon sac. Plus habitué à monter ce tarp sur mon vélo de gravel lors de mes sorties bikepacking, nous installons le camp en 15 minutes environ.
Un tarp est une bâche de grande taille imperméable qui peut faire office d’abris ou autre. La mienne est carrée et fait 3 mètres de côté. Associée à 2 bâtons de randonnée, quelques sardines et de la cordelette, le dispositif fait une tente légère. Pourquoi un tarp et pas une tente ? Car, je n’ai pas de tente, et ce tarp me permet d’envelopper mon vélo afin d’en faire une housse pour prendre le TGV. Avec ce tarp j’ai 2 usages (housse et tente) avec un seul article.
Souvent, on me demande pourquoi dormir dehors dans le froid, le vent, la pluie quand il y a des refuges ou des tentes bien fermées disponibles. Je réponds que j’aime ça et que cela fait partie de l’aventure. En fait j’aime être sous cette toile en pleine nature et savoir que je fais partie d’un tout. J’apprécie d’entendre les sons de la nature et j’aime sentir cette bise qui traverse mon abri. Je me sens pleinement vivant. Et pour tout dire, je trouve cela très confortable.
Il y a deux semaines, j’avais tenté un bivouac hivernal en Sologne avec des températures de -1 °C et j’avais trouvé cela très agréable. Il était temps de tester le matériel et ma configuration en mode montagne avec de la neige. C’est chose faite. Il y a des améliorations à apporter mais globalement tout s’est très bien passé. C’est encourageant et ouvre des horizons !
Réveil naturel à 7h30 avec la vue sur le lac gelé. Un vent important a soufflé toute la nuit et souffle encore. Je m’extirpe de mon sac de couchage et me dirige vers le lac pour apprécier la vue et le moment. Hugues et moi sommes reposés et plutôt fiers de notre nuit de bivouac hivernal dans la neige et le vent.
Nous retrouvons nos trois compères dans le refuge. Il ne faut pas traîner car les conditions météorologiques s’annoncent mauvaises. Nous petit-déjeunons et faisons les sacs rapidement. Le trajet initialement prévu devait faire 20 km, mais nous avons réduit de beaucoup car la neige qui tombe depuis minuit a déjà déposé 10 bons centimètres et le vent qui souffle fort rend les conditions peu propices à la promenade.
Cela dit, cette météo transforme notre aventure en expédition polaire. Nous avons l’impression d’être des explorateurs dans une contrée reculée. Le dépaysement est total. C’est exactement ce que nous voulions sans oser l’imaginer.
Après 45 minutes de “progression” nous arrivons au refuge de Machais. C’est l’occasion de faire un point carte et de “visiter” ce refuge mieux entretenu et mieux isolé que celui de Blanchemer. Prochaine fois, nous pousserons jusque la pour la nuit.
Ensuite, c’est l’ascension jusqu’au Rainkopf en empruntant la ligne de crête au dessus de la route des crêtes. La poudreuse rend la lecture du tracé difficile. Nous sommes seuls au monde. Nous n’avons croisé personne. Qui voudrait s’aventurer ici dans ces conditions. Le vent souffle à plus de 100 km/h, la neige ne cesse de tomber et il fait froid, très froid. Nous sommes bien équipés même si les chaussures et les gants de Joao commencent à montrer des signes de faiblesse.
En sortant du bois pour rejoindre le refuge du Rainkopf, c’est le déluge. Il nous est difficile d’avancer sans manquer d’être déséquilibré par le vent qui souffle par rafale. La neige glacée nous gifle le visage et se dépose sur mes verres de lunette. Je n’y vois plus rien, enfin juste assez pour constater que le paysage est magnifique et qu’il faut que je sorte mon appareil pour faire quelques photos. C’est tellement beau que je ne peux pas repartir sans déclencher.
Arrivés devant le refuge, la batterie externe et celle de mon smartphone rendent l’âme, le froid aura eu raison des derniers pourcents. Dans le vent, et en hurlant pour nous faire comprendre, nous convenons de rejoindre le parking du Sotré par la route des crêtes et non pas le sentier qui passe par le sommet du Hohneck. Cela a assez duré. Il nous faudra encore une bonne heure pour retrouver la voiture. La route est verglacée et couverte de congères qu’il est difficile de distinguer dans ce brouillard et ce vent. La progression est lente et n’en fini plus.
Notre ultime refuge sera la voiture qui nous conduira à Nancy pour notre train. Mais avant cela, il faut la déneiger, la réchauffer, la dégivrer, la chausser de chaînes et nous changer à l’intérieur. Une expédition à part entière qui prendra une bonne heure encore.
En descendant par la route, à 30 km/h, nous partageons à chaud les quelques émotions qui nous viennent, mais le trajet est bien calme finalement.
C’est seulement de retour chez moi en regardant les photos et en visionnant le film regroupant les multiples séquences que je me rends compte de l’aventure que nous avons vécu. C’était magique.
Le lendemain, l’Est Républicain faisait le récit d’une jeune femme de 34 ans qui, ce même dimanche 6 février 2022, s’était perdue sur la route des crêtes proche du Valtin à cause de la tempête. Elle s’était réfugiée dans les bois pour se protéger du vent et avait appelé le peloton de gendarmerie de haute montagne (PGHM) de Xonrupt-Longemer qui est venu la secourir. (https://www.estrepublicain.fr/faits-divers-justice/2022/02/08/une-randonneuse-secourue-en-pleine-tempete-au-valtin)
Nous avons partagé tous les cinq une micro-aventure dont nous nous souviendrons longtemps et qui restera gravée dans nos mémoires.
P.S.: La montagne peut être dangereuse, il ne faut pas prendre à la légère la préparation et le matériel nécessaires à une sortie en montagne. C’est parce que nous avions bien préparé le weekend que nous avons profité un maximum, même dans des conditions difficiles. Le tracé était programmé, nous avions une carte papier et la trace GPX dans nos smartphones. Chacun d’entre nous avait le matériel nécessaire pour avoir chaud, se protéger du vent et de la pluie, de quoi manger pour l’ensemble des repas et le matériel nécessaire pour dormir par des températures négatives.
Pour vous donner une idée, je vous partage le contenu de mon sac à dos (poids total de 8,5 kg)
FONCTION | ARTICLE | POIDS EN GM |
---|---|---|
BOIRE | GOBELET METAL 400 ML | 125 |
BOIRE | PLATYPUS | 26 |
BOIRE | PLATYPUS MOUSQUETON | 40 |
BOIRE | GOBELET PLASTIQUE PLIABLE | 21 |
DIVERS | LAMPE FRONTALE | 85 |
DIVERS | BATON RANDO X2 | 570 |
DIVERS | MINI PELLE BLEUE | 20 |
LAYER 1 | DÉBARDEUR 100% MÉRINOS | 125 |
LAYER 1 | POLO 100% MERINOS MANCHES LONGUES | 360 |
LAYER 1 | COLLANT | 125 |
LAYER 2 | DOUDOUNE BERGANS 800 CUINS | 582 |
LAYER 2 | CHEMISE FLANELLE | 300 |
LAYER 3 | VESTE EVADIC | 230 |
MANGER | MINI FOURNEAU | 225 |
MANGER | COMBO COUTEAU, FOURCHETTE | 66 |
MANGER | REPAS (4 REPAS + À COTÉS) | 1400 |
NUIT | DRAP DE SOIE | 110 |
NUIT | SAC DE COUCHAGE WANABEE DUVET 5°C CONFORT | 1050 |
NUIT | BIVY | 135 |
NUIT | MATELAS FORCLAZ R1,7 | 510 |
NUIT | TARP QUECHUA | 1000 |
NUIT | SARDINES (7 MINI) | 235 |
NUIT | BÂCHE DE SOL - 160X110 | 108 |
PLUIE | GUÊTRES | |
PLUIE | PARAPLUIE | 210 |
PLUIE | SUR PANTALON PLUIE | 216 |
PLUIE | SUR MOUFFLES PLUIE | 47 |
PLUIE | PROTECTION DE PLUIE SAC À DOS | |
SAC | MINI SACOCHE QUECHUA | 82 |
SAC | SIMOND 33L + 8L | 500 |
VÊTEMENTS | CHAUSSETTES MÉRINOS #1 | 50 |
VÊTEMENTS | CHAUSSETTES MÉRINOS #2 DE NUIT | 110 |
VÊTEMENTS | BOXER MÉRINOS | 83 |
VÊTEMENTS | BOXER CHANGE | 40 |
VÊTEMENTS | GILET SANS MANCHES VAN RYSEL | 100 |
VÊTEMENTS | TOUR DE COU | |
VÊTEMENTS | PANTALON RANDO | 412 |
MOUFLES LAINE | 96 | |
BATTERIE 8 000 | 300 | |
CABLES BATTERIE | 55 | |
TROUSSE DE SECOURS | 212 |
Je me déplace à vélo et je suis un grand fan de montagne, d'escalade de bloc, de photographie, de basket ball et de vélo. J'aime être avec ma famille et avoir l'opportunité de voir grandir mon fils.